Mémoire pour les consultations prébudgétaires en vue du budget fédéral de 2025
Introduction
Les décideurs gouvernementaux, tant ruraux qu’urbains, ont la responsabilité de donner la priorité à l’avantage concurrentiel des collectivités rurales du Canada.
Les zones rurales abritent un quart de la population du Canada et englobent des secteurs clés qui constituent le moteur économique du pays : des ressources naturelles, comme la sylviculture, l’énergie, l’agriculture et l’exploitation minière, aux entreprises innovantes dans les domaines du tourisme, de la technologie, des soins de santé, de l’industrie manufacturière et bien d’autres encore.
Les collectivités rurales contribuent à hauteur de 30 % du PIB du Canada, abritant 315 221 petites entreprises qui paient plus que leur juste part d’impôts tout en générant des emplois bien rémunérés et des occasions d’investissement qui stimulent la croissance économique à l’échelle nationale.
Nous devons reconnaître les avantages incroyables que le Canada rural apporte à notre nation, mais nous devons également reconnaître les divers défis auxquels ces collectivités sont confrontées.
À propos du Groupe pour la promotion de la prospérité rurale
Le Canada n’a pas d’avantage concurrentiel plus important que ses ressources naturelles, notamment l’agriculture, l’exploitation minière, l’énergie et la sylviculture. Pourtant, les voix des collectivités rurales qui alimentent ces secteurs se perdent souvent dans la conversation nationale.
Le Groupe pour la promotion de la prospérité rurale vise à combler ce fossé entre les collectivités rurales et les décideurs. Ensemble, nous visons à approfondir les liens et à favoriser le dialogue avec le gouvernement fédéral, les entreprises et la société civile afin de garantir que les perspectives rurales influencent l’élaboration des politiques publiques.
Appliquer une optique rurale à toutes les initiatives gouvernementales
Alors que le gouvernement cherche à relever les défis auxquels sont confrontées les familles canadiennes, les fonctionnaires et les politiciens d’Ottawa élaborent souvent des politiques sans en comprendre pleinement les conséquences involontaires. Ces politiques soutiennent souvent de manière disproportionnée les collectivités urbaines, où les ressources sont plus accessibles, et pénalisent involontairement les zones rurales, ne répondant pas aux besoins des collectivités rurales et isolées.
Si les collectivités locales peuvent investir des milliards de dollars dans des trains légers à Vancouver, Toronto ou Montréal, les mêmes possibilités doivent être offertes aux petites collectivités pour investir dans le transport régional par bus, la construction de routes ou l’accès à des services facilitant le commerce. Au lieu de cela, les initiatives politiques se concentrent souvent sur les collectivités urbaines riches en voix.
Avec le soutien par des subventions de services coûteux dans les collectivités urbaines, il est important que les gouvernements fournissent des mesures ciblées qui apportent des contributions significatives aux familles en dehors de nos centres-villes. En outre, ces programmes ne doivent pas être assortis de procédures et de critères de demande lourds qui empêchent les petites collectivités de solliciter efficacement un financement.
Il est en outre impératif que le gouvernement commence à développer des indicateurs spécifiques et à appliquer une approche rurale ou locale à la politique. En établissant des critères qui apprécient et valorisent le mode de vie rural, elle peut adapter les approches politiques afin de garantir une flexibilité et une adaptabilité qui conviennent à la fois aux familles urbaines et rurales. Le gouvernement, dans le cadre de ses initiatives de transparence, devrait veiller à ce que les entreprises et les Canadiens aient accès à ces mesures et statistiques pour les évaluer.
Nous recommandons en outre que l’ensemble du gouvernement s’efforce d’évaluer les politiques sous l’angle de l’amélioration de la productivité, de la connectivité (physique et numérique) et de l’accès équitable aux services essentiels comme les soins de santé et l’éducation.
Recommandation 1 : Que le gouvernement mette en place et applique une optique rurale à toutes ses initiatives politiques et budgétaires et qu’il veille à ce que les programmes ne profitent pas de manière inéquitable ou n’affectent pas négativement certaines collectivités au détriment d’autres.
Réduire l’écart de productivité des collectivités rurales en améliorant l’accès aux services essentiels
Les Canadiens vivant dans les zones rurales n’ont souvent pas accès aux services essentiels que les habitants des zones urbaines considèrent comme acquis. Plus précisément, ces collectivités doivent souvent faire des heures de route pour consulter un médecin de famille, se déplacer vers les centres urbains pour accéder à des possibilités de formation ou d’éducation, ou avoir un accès peu fiable à des infrastructures favorisant le commerce.
Comme une grande partie du Canada rural travaille dans l’agriculture et les ressources naturelles, ces services sont essentiels pour stimuler la croissance économique de leurs collectivités, mais aussi du Canada. Le sous-investissement dans les services essentiels pour les Canadiens des zones rurales a de graves répercussions sur la productivité nationale.
Comme l’a noté la Coalition pour un avenir meilleur dans son récent rapport Croissance fragile : « C’est plus qu’une question d’équité. Certes, nous pensons que les Canadiens des zones rurales ont droit à des services essentiels tels que la connectivité Internet, les transports, l’éducation et les soins de santé. Mais le développement du Canada rural est un impératif économique pour nous tous. Cela vaut particulièrement aujourd’hui, alors que la résilience économique – de la sécurité alimentaire aux chaînes d’approvisionnement – devient de plus en plus incontournable.
Le manque d’accès à ces services de base se traduit par des heures passées loin de la famille et du travail, par une perte de productivité et par une inégalité générale des possibilités de développement de leur entreprise ou de leurs revenus. Le gouvernement devrait mettre davantage l’accent sur le soutien de ces services essentiels à la construction de la collectivité afin d’aider les familles rurales.
La connectivité, l’un des principaux moteurs du développement économique et social dans un monde de plus en plus numérique, vient encore compliquer ces défis. Les dirigeants du monde entier ont reconnu la nécessité de développer les possibilités d’apprendre et de communiquer avec les autres grâce à des connexions à large bande fiables. L’amélioration de la connectivité a été l’un des principaux moteurs du développement des économies émergentes dans le monde entier – dans de nombreux cas avec le soutien de la technologie canadienne – et pourtant, à l’échelle nationale, de vastes portions de notre pays n’ont toujours pas accès à la large bande à haut débit. Ou, tout aussi injustement, les habitants des zones rurales paient les mêmes tarifs pour les services que leurs voisins urbains, alors qu’ils ne bénéficient que d’une fraction du service fourni.
L’accès au haut débit dans les collectivités rurales du Canada ne couvre encore que 62 % de la population, contre 91,4 % dans les zones urbaines, et il manque souvent cruellement de fiabilité. Les infrastructures et les systèmes de transport sont peu nombreux, laissant des millions de personnes dans les zones rurales et éloignées sans accès aux services que les Canadiens urbains considèrent comme acquis.
Il est essentiel que le gouvernement prenne des mesures immédiates pour remédier à la disparité d’accès à Internet à large bande. Cela devrait inclure un examen par l’ensemble du gouvernement des mesures législatives et réglementaires prises par le passé afin d’évaluer leur efficacité à garantir un accès équitable à Internet à haut débit pour toutes les collectivités.
Recommandation 2 : Que le gouvernement et les parlementaires investissent dans des outils ou utilisent tous ceux disponibles pour soutenir les initiatives qui élargissent l’accès aux services essentiels dans les collectivités rurales et éloignées, y compris l’accès à des services de santé fiables, à Internet à large bande, à des services d’infrastructure favorisant le commerce et à des programmes de développement des compétences.
Améliorer l’équité fiscale et réglementaire pour les collectivités et les entreprises rurales
Les Canadiens paient des impôts parmi les plus élevés de l’OCDE, mais les collectivités rurales sont souvent touchées de manière disproportionnée par ces impôts élevés, alors qu’elles reçoivent moins que leur juste part des dépenses publiques. L’incidence de ces niveaux d’imposition se traduit par un profond déficit de productivité et de compétitivité pour les entreprises au Canada, en particulier par rapport à nos partenaires commerciaux les plus proches, les États-Unis.
Les récentes modifications fiscales et réglementaires, notamment l’augmentation du taux de prise en compte des plus-values, la taxe carbone et le traitement des transferts agricoles intergénérationnels, entre autres, ont eu des répercussions graves et négatives sur les familles rurales. Il s’agit également d’exemples clairs d’une politique fiscale qui ne tient pas pleinement compte de la contribution des collectivités rurales et éloignées du Canada et de leur contribution aux intérêts économiques nationaux.
De même, le gouvernement fédéral a manqué l’occasion de développer les collectivités rurales et éloignées du Canada en soutenant les petites et moyennes entreprises qui offrent des occasions économiques aux familles locales.
De plus en plus souvent, les villes canadiennes voient des acteurs majeurs de l’industrie fermer leurs portes en raison de réglementations gouvernementales mal conçues. Il en résulte une tendance inquiétante au ralentissement des activités économiques et une pression croissante en faveur de l’installation dans les grandes métropoles.
Un rapport de Statistique Canada en 2022 a mis en évidence ces défis, notant que 73,7 % des Canadiens vivaient dans de grands centres urbains, les grands centres urbains (avec une population de plus de 100 000 habitants) enregistrant la plus forte croissance (5,2 % entre 2016 et 2021), tandis que les zones rurales ont augmenté de 0,4 % au cours de la même période.
Alors que le gouvernement cherche à relever les défis auxquels le Canada est confronté en matière de logement, de transport et d’emploi, il doit reconnaître les avantages économiques et sociaux du mode de vie rural, en investissant et en soutenant des politiques fiscales et réglementaires qui encouragent ces collectivités à se développer, plutôt que de les punir en raison de l’endroit où elles vivent et travaillent.
Recommandation 3 : Que le gouvernement s’efforce d’éliminer ou de modifier les politiques fiscales et réglementaires qui ont une incidence négative et disproportionnée sur les familles et les employeurs des collectivités rurales.
Conclusion
Le Canada rural est essentiel pour créer la nation sûre, saine et prospère que nous souhaitons tous. Il est donc essentiel de hiérarchiser les priorités, les objectifs et les besoins des zones rurales dans les processus de prise de décision.
Cet effort ne se limite pas à combler les lacunes avec les décideurs politiques fédéraux ou à offrir un traitement spécial aux Canadiens ruraux. Il s’agit de renforcer les liens avec le monde des affaires, les leaders d’opinion, les médias, les fonctionnaires et le monde universitaire. La mise en oeuvre d’une perspective rurale dans l’élaboration des politiques permet de s’assurer que les politiques ne nuisent pas involontairement ou de manière disproportionnée au Canada rural. Il s’agit plutôt de faire des zones rurales des lieux de vie et de travail dynamiques et prospères, au bénéfice de l’ensemble du pays. Il s’agit d’appliquer une optique rurale et d’analyser toutes les politiques publiques afin de s’assurer que le Canada rural n’est pas négligé. Il s’agit de reconnaître, d’apprécier et de protéger le mode de vie unique du Canada rural et de ses communautés.